samedi 24 avril 2021

Editorial, Revue Socialisme International, N° 10, été 2004

 [Article de 2004 archivé ici]

Editorial Socialisme International N° 10 été 2004

La rue doit décider !
 

Nous sortons cette revue quelques jours avant les élections européennes du 13 juin. Après les élections régionales d’avril, il semblerait que toutes les forces politiques se trouvent dans une position hésitante ou contradictoire. Le gouvernement Raffarin a pris peur après son score désastreux, ce qui l’a mené rapidement à faire marche arrière sur les dossiers des chercheurs et des intermittents, prenant le risque d’encourager d’autres luttes. Il a également annoncé une augmentation du SMIC pour juillet, espérant ainsi en partie désamorcer le mécontentement des salariés.

Sur le dossier de la Sécurité sociale il a attaqué quand même - priorités du MEDEF oblige. Il espère que les salariés n’ont pas gagné trop en confiance depuis leur défaite sur le dossier des retraites, et que le fait que l’attaque soit un peu moins forte que prévue endorme les gens.

L’attaque contre la Sécu affecte l’ensemble des travailleurs sur un sujet dont ils comprennent l’importance. Les manifestations du 5 juin ont rassemblé plus de 250 000 personnes, mais un mouvement plus large sera nécessaire pour faire reculer le gouvernement. C’est un mouvement auto-organisé par la base des syndiqués, et par des collectifs de défense de la Sécu dont on aura besoin pour pousser les directions syndicales frileuses à lutter vraiment, à préparer les conditions pour une grève générale.

La gauche parlementaire a repris du poil de la bête avec les résultats des régionales et les sondages la mettent en très bonne position. Mais cette gauche reste pour l’essentiel axée sur une future reconstitution de la gauche plurielle autour du PS. Et le soutien au PS est souvent « faute de mieux » - les mêmes sondages montrent que même parmi ceux qui se décrivent comme « sympathisant du PS », 49% pensent que le PS « n’a pas de réelles propositions alternatives ».

Si le soutien au PS est hésitant, une force anticapitaliste populaire et dynamique fait sérieusement défaut. L’immobilisme par rapport à la création d’un force anticapitaliste qui dépasserait les rangs de l’extrême gauche et sa difficulté à se construire dans les entreprises et dans les syndicats sont des éléments qui ont certainement fragilisé sa côte de popularité. L’audience médiatique de la LCR ne se prolonge pas vraiment en termes de construction organisationnelle chez les jeunes et les travailleurs. Plus grave, nombre de militants ayant adhéré récemment quittent les rangs de l’organisation, faute d’une vision claire des perspectives.

La popularité un peu aléatoire de l’extrême gauche peut aussi refléter des aspects de démoralisation chez les travailleurs qui ne sont pas forcément convaincus que des élus révolutionnaires aient le pouvoir ou la volonté de changer leur quotidien.

La contestation altermondialiste ou syndicale est également hésitante. Les manifestations pour la sécu et contre la guerre montrent un vrai dynamisme, sans pour autant réussir à passer le cap vers un mouvement réellement massif. Après la défaite sur les retraites, les salariés hésitent, sans une direction plus déterminée, à entrer en lutte.

Les listes « 100% altermondialistes » retirées au dernier moment, les listes « EuroPalestine » et d’autres démontrent que beaucoup de militants cherchent - en ordre dispersé - des moyens d’influencer directement le paysage et les institutions politiques. L’extrême gauche n’a pas su pour l’instant convaincre assez largement de son utilité pour les mouvements à une échelle de masse.

Pourtant, la dernière manifestation du 5 juin contre le terroriste Bush révèle que les luttes politiques de masse sont encore capables de rassembler des milliers de jeunes. Elles nous donnent la clé pour comprendre l’urgence et l’importance d’intervenir prioritairement dans ce milieu.
La question de l’impérialisme a toujours été décisive pour les révolutionnaires. Répondre à cette question, c’est poser le problème de la révolution comme alternative à la barbarie capitaliste.

De tous les révolutionnaires, Lénine a été le plus loin dans l’analyse de l’impérialisme ; en 1917, alors que la Russie était plongée dans l’horreur de la guerre, la question de la prise du pouvoir se posait directement aux travailleurs.
Notre dossier sur Lénine et la révolution russe s’occupe d’étudier toutes les questions qui se posaient aux révolutionnaires russes durant cette période. Ce dossier n’a pas pour objet de calquer une situation politique à une autre, mais il fourmille d’enseignements qui devraient aider les militants d’aujourd’hui à mieux comprendre les enjeux actuels.

Les luttes économiques, politiques et idéologiques doivent toutes être menées de front, et ces luttes dans les mois et les années à venir auront tendance à s’accélérer et à poser de plus en plus clairement la question du pouvoir dans la société.
Bonne lecture !

[Quelques coquilles corrigées plus tard.]